Lors de son passage à la Tribune des Nations Unies, le premier ministre par intérim, le colonel Abdoulaye Maiga s’en est pris virulemment au patron des nations unies, à certains chefs d’Etat de la région ainsi qu’à la France.
Le premier ministre par intérim était attendu le 24 Septembre dernier pour son allocution lors de la 77ème assemblée générale des Nations Unies. Pour rappel, en 2021 le Premier ministre Choguel Maïga avait délivré un discours apprécié par l’opinion publique. Il était attendu de même pour sa part, lui qui a l’habitude des répliques virulentes. C’est avec une attitude diplomatiquement peu correcte que le Col. Abdoulaye Maiga s’est exprimé à la Tribune des Nations unies en guise de réponse à ceux qui se sont exprimés sur le Mali, en marge de cette assemblée. Il ne pouvait pas manquer cette opportunité particulière sans attaquer également à la France. Ces invectives révèlent les divergences de position entre le Mali et certains de ses partenaires.
Le désaccord avec Antonio Guterres
Quelques jours auparavant, le secrétaire général des Nations Unis s’était exprimé dans l’affaire des 46 militaires ivoiriens détenus au Mali, lors d’un entretien sur RFI et France 24. Il déclarait que les militaires ivoiriens détenus au Mali ne sont pas des mercenaires. Le premier ministre par intérim a affirmé son désaccord suite aux propos du patron de l’ONU en ajoutant que : «c’est une affaire bilatérale et judiciaire entre deux pays frères. C’est évident que la qualification judiciaire des infractions liées à cette affaire ne relève pas des attributions du secrétaire général des Nations Unies…… ». Les relations entre les deux pays étaient déjà tendues avant cette affaire. Au-delà des relations diplomatiques, elle impacte les relations culturelles car plusieurs concerts ont dû être annulés. Il a réitéré une fois de plus l’impératif de reconfigurer la MINUSMA qui, comme les autres missions en Afrique, fait l’objet de vives critiques. Depuis 10 ans de présence, elle est loin d’atteindre ses objectifs.
Certains chefs d’état de la région n’ont pas été épargnés
En marge de l’assemblée générale des nations Unis, le président Bissau Guinéen, président en exercice de la CEDEAO Umaru Sissoco Embalo a affirmé qu’à la place des autorités maliennes, il aurait relâché les 46 militaires ivoiriens après la déclaration d’Antonio Guterres. Il a accusé le président Embalo de mimer Guterres et affirme que le secrétaire général des Nations unies n’est pas un chef d’Etat et le président en exercice de la Cédéao n’est pas un fonctionnaire et par conséquent, il serait indiqué qu’il ne banalise pas la CEDEAO, une manière plus courtoise de lui demander de ne pas prendre à légère la charge de président en exercice de la CEDEAO.
Il a été plus virulent quant au président Bazoum qui ne manque pas d’occasion de critiquer les autorités maliennes de transition. Lors de sa dernière sortie médiatique le président du Niger a jugé l’affaire des 46 militaires d’absurde et a estimé que le président Ouattara a été payé par l’ingratitude car il a grandement œuvré pour la levée des sanctions de la CEDEAO. Si les autorités de transition n’ont officiellement jamais répondu aux propos du président Bazoum, la tribune de l’ONU ne demeurait pas moins l’occasion parfaite. Pour le premier ministre par intérim, le Mali ne va pas se rabaisser au même niveau de Bazoum, il va jusqu’à mettre en doute l’identité du président nigérien en le traitant de « l’étranger qui se réclame du Niger… », une référence peut-être aux détracteurs et opposants qui auraient remis en cause la nationalité du président du Niger et cela soulève la question d’appartenance, source de fragilité sociale en Afrique de l’Ouest. Cette déclaration risque de détériorer davantage les relations déjà fragiles.
Contrairement aux deux chefs d’état, le colonel Maiga a été moins discourtois à l’endroit du président ivoirien Alassane Ouattara. Lors de son passage à la Tribune des Nations Unies le président Ouattara appelle à la libération sans délai des militaires ivoiriens d’arrêtés au Mali et encourage les autorités maliennes à concentrer leurs efforts sur la lutte contre le terrorisme et à mettre en œuvre les différentes étapes de la transition ainsi que les réformes politiques et institutionnelles en vue des élections présidentielles prévues en 2024. Il a ensuite lancé une flèche au président ivoirien sur son 3ème mandat en faisant référence à une métaphore footballistique » Le 3ème mandat, c’est de la magie. C’est l’art de se dribbler soi-même tout en gardant le ballon »
La France n’a pas été épargnée
« Les autorités françaises, profondément anti-françaises pour avoir renié les valeurs morales universelles et trahi le lourd héritage humaniste des philosophes des lumières, se sont transformées en une junte au service de l’obscurantisme »
Le colonel Abdoulaye Maiga n’a pas manqué de s’attaquer une fois de plus à la France. Il estime que le Mali a été poignardé dans le dos par les autorités françaises avec le retrait annoncé unilatéralement de l’opération Barkhane. Le mot « Junte », pour qualifier les autorités françaises, a été utilisé en guise de réponse à ce même terme employé par les autorités et médias français à l’égard des autorités maliennes. Accusant les agissements français de « pratique néocoloniale, condescendante, paternaliste et revancharde », il s’est exprimé sur la violations de l’espace aérien du Mali par les vecteurs aériens français et la nécessité de donner suite à la requête du Mali, celle d’un conseil d’urgence afin d’apporter les preuves que la France soutiendrait des terroristes.